Une marche de 100 kilomètres sur 4 jours de Champsecret dans l’Orne au Mont-Saint-Michel, c’était pour moi un nouveau défi et une nouvelle expérience de marche.

Après Meaux-Nangis en solitaire, un brevet de marche athlétique de 30 km, un voyage métropolitain de deux jours, Paris-Meaux, le tour de Paris par le GR75, ou encore l’Opération Montagne Responsable organisée par Lafuma, le Sentier était un nouvel objectif que je me devais de réaliser.

L’émission Des Racines et des Ailes consacrée à la traversée de la baie du Mont-Saint-Michel a fait naître l’envie de me lancer ce nouveau défi, encore fallait-il trouver quand pouvoir le faire. Le calendrier 2022 était une belle occasion avec ce jeudi 14 juillet. Juste une journée à poser pour la veille, et une matinée à récupérer.

Tracé sur l’ancien chemin historique de pèlerinage reliant Champsecret au Mont-Saint-Michel, le Sentier a vu défiler à travers des siècles des centaines de milliers de pèlerins et les rois de France. Il verra donc un nouveau groupe avec moi et Corinne. Le Sentier en couple est bien sûr encore plus agréable.

Il fallait se faire à l’idée de partir avec le strict minimum sur ces chemins historiques, sans savoir où nous mangerons, où nous dormirons, si nous supporterons la chaleur, les douleurs, le poids du sac, ni si nous aurons du réseau pour partager notre aventure. Cette marche est avant tout une invitation à nous recentrer sur nous même en suivant les 5 compagnons qui nous accompagnerons jusqu’à l’arrivée au Mont-Saint-Michel.

C’est une première expérience qui débute au Secret Knight le mardi après midi, veille du grand départ. De nombreux participants sont déjà là, nombre d’entre eux se connaissent déjà, et connaissent déjà le sentier, pour d’autres c’est l’inconnu, comme moi et Corinne.

L’ambiance est agréable, détendue, on se présente ici et là, on boit un coup. Nous rejoignons en soirée le camp de l’association, avec le fameux TIPI. Nous ne mettrons pas notre tente pour ne pas perdre de temps… Ce sera une nuit dans le TIPI. Une première découverte avant de prendre le Sentier alors que d’autres dormiront sous un tarp ou à la belle étoile. Le retour à la nature est déjà bien engagé.

Nous rejoignons la trentaine de pèlerins et les 5 compagnons devant le Secret Knight le mercredi matin, pour une première étape qui s’annonce chaude et ensoleillée. Après le briefing de départ et les présentations, nous traversons Champsecret et en sortons par une petite route avec du dénivelé qui laisse présager des deux premières étapes annoncées comme les plus difficiles.

Nous faisons de nombreuses haltes pour nous regrouper. A la première pause, certains prennent déjà soin de leurs pieds… Pommades, talc…

Cette première étape nous mène de Champsecret à Lonlay l’Abbaye où nous sommes accueillis très chaleureusement au Bar du Moulin. Nous devons faire nos courses pour prévoir le petit déjeuner du lendemain et le repas du soir avant de profiter du jardin de l’abbaye et de l’Egrenne, une petite rivière de Normandie de près de 37 km de long pour nous rafraîchir. Chacun de nous installe son campement autour de l’abbaye, nous nous rejoignons tous ensemble pour un moment convivial où je ramène mon ukulélé pour quelques chansons partagés. Nous entendons quelques pétards ici et là c’est le soir du 13 juillet, un feu d’artifice au loin… première nuit dans notre tente.

Le maire de Lonlay l’Abbaye, Christian Derouet, est présent le jeudi matin au Bar du Moulin. Nous avons droit à un beau discours vantant son village et la sauvegarde de certains services, avant de repartir pour la deuxième étape annoncée comme la plus difficile. Près de 700 mètres de dénivelé positif et 600 mètres de dénivelé négatif, et plus de 12 heures dehors pour arriver au terme de cette étape, près de Mortain. Sur cette étape, nous passons devant la Biscuiterie de l’Abbaye et découvrons au terme d’une halte, le Château de la Bière. 14 juillet, dommage, ces endroits sont fermés, ce ne sera pas aujourd’hui que nous goûterons à la bière du Château ni aux gâteaux. Nous passons sur le site remarquable de la Fosse Arthour où nous prenons le temps de nous rafraîchir dans la Sonce, une petite rivière qui a façonné ce lieu remarquable. Nous sommes nombreux à profiter également d’une pause gourmande ou rafraîchissante à l’Auberge de la Fosse Arthour avant le pique-nique du midi. Après une rude journée, nous empruntons dans les derniers kilomètres un long chemin très pentu qui nous mène à la Chapelle Saint Michel. Un point de vue nous y attend pour voir au loin le Mont Saint Michel à près de 45 kilomètres.

Cette deuxième étape très longue et éprouvante, à cause du dénivelé et de la chaleur, se termine au Moulin des Quatre Temps. C’est là que nous passons la nuit pour pouvoir récupérer pleinement. Dormir dans un lit, pouvoir profiter d’une douche, après ces deux premiers jours de marche et de canicule, c’est le grand luxe ! Nous y avons un accueil rare et généreux, tenue par la famille Zurek, qui s’est lancée depuis peu dans l’accueil des pèlerins souhaitant trouver refuge avant leur arrivée au Mont Saint-Michel.

Après une nuit dans un lit et un bon petit déjeuner au Moulin des Quatre Temps, notre troisième étape nous mène de Mortain à Isigny Le Buat. Nous repartons à 9 heures avec la découverte des cascades de Mortain. Merveilleux paysage, on s’arrêterait bien pour profiter de l’endroit mais nous n’avons pas le temps. La route est encore longue pour le Mont Saint Michel. Nous empruntons durant cette étape une longue partie de la Voie Verte de la Baie du Mont Saint Michel sur laquelle nous croisons de nombreux cyclistes. A Isisgny Le Buat, nous passons la nuit sur un terrain en pleine ville. A quelques mètres seulement un concert de rock anime la soirée. C’est la dernière occasion de passer une nuit à la belle étoile. Nous décidons donc de ne pas monter la tente et de faire notre première nuit à la belle étoile. Juste mon crâne aura eu un peu froid. Une belle expérience que nous renouvellerons volontiers.

La dernière étape fait près de 30 kilomètres. Pour pouvoir arriver à temps à cause de la marée et pouvoir traverser la baie, nous partons dès 7 heures du matin. Beaucoup ont des ampoules mais personnes ne veut abandonner. Nous marchons longtemps sur des routes en pleine campagne. Nous traversons le village de Chalandrey et faisons une halte à l’église Saint-Martin. Comme à chaque halte, quelques compagnons chantent dans l’église le chant du pèlerin. Nous arrivons à Ducey pour un petit déjeuner et faire nos courses pour le midi.

Après une pause déjeuner à Pontaubault, nous repartons pour notre dernière ligne droite. Nous traversons les prés salés du Mont-Saint-Michel. La chaleur est présente, certains ont du mal à marcher mais la force collective les pousse encore et toujours vers le Mont. Nous faisons une pause pour attendre le passeur. Celui-ci arrive et se présente. Nous marchons encore quelques mètres dans les prés salés mais cette fois ci pieds nus et en chaussettes pour certains qui ont de fortes ampoules. Nous arrivons enfin sur le sable. Le passeur cherche, étudie le terrain pour savoir où passer. Il nous montre le sable mouvant et nous alerte de sa dangerosité. Nous faisons à sa demande des lignes de 10 personnes pour franchir la première rivière. « Ne vous arrêtez pas, marchez vite ! » Certains tombent, y compris moi, mais nous arrivons tous à nous relever malgré le poids du sac. Cette première étape dans la baie était pour le passeur la plus dangereuse. Les autres franchissements se passeront bien.

Le Mont-Saint-Michel grossit à l’horizon, nous avons l’impression d’être arrivé mais nous avançons doucement. Le poids du sac, le sable dur et bosselé, la chaleur, la fatigue, ces derniers kilomètres sont éprouvants. Croyant n’être qu’à quelques pas du Mont, le passeur nous annonce encore une heure de marche. Au final c’est près de 8 kilomètres de marche dans la baie. C’est très long en ligne droite…. Mais nous arrivons avec satisfaction et fierté. L’arrivée est une délivrance pour tous. C’est la force collective qui a porté chacun de nous à cette réussite.

Nous aurons tous plus ou moins souffert.. On aura beau tirer la langue, suer, souffrir, on aura tous ce même bonheur d’arriver, de se dire on l’a fait !

Nous sommes reçus dès le samedi soir à notre arrivée au Mont, par le père Don Maurice Franc, afin d’échanger sur notre marche de 4 jours. Les mots s’échangent : communion, fraternité, écoute, découverte, re-découverte pour certains…..

Pour la nuit, nous sommes hébergés dans la Salle Henri Voisin de la Maison Mal-Clos. Nous avons le plaisir d’être sur le Mont en pleine nuit, sans la foule, et de profiter du lieu aussi au petit matin un peu avant et après la messe tout en chant qui nous est offerte à l’abbaye le dimanche matin.

Nous quittons le Mont vers 11 heures le dimanche, pour rejoindre notre car en direction de Champsecret. Nous ne reverrons peut être jamais toutes ces personnes qui nous ont accompagné durant ces 4 jours. Mais les souvenirs et les personnes qui nous ont accompagné durant cette longue marche sont à jamais gravés dans nos mémoires.

Je vous invite à regarder de nombreuses photos prises tout au long de nos 4 jours de marche.